Synopsis : En plein cœur de la nuit, les 17 enfants d’une classe de l’école primaire de Maybrook aux États-Unis se réveillent à une heure précise et s’enfuient de leurs foyers. Mus par une force inébranlable, ils sont partis à la course et personne ne sait où ils s’en sont allés. Tous ont disparu, sauf un. Alex est le seul élève restant. Paniqués et inquiets, les parents soupçonnent l’enseignante Justine Gandy d’avoir manigancé quelque chose.
Ressenti : Si Barbarian (2022) portait clairement l’empreinte de Sam Raimi, le nouveau long-métrage de Zach Cregger, Weapons (Évanouis), semble davantage convoquer l’influence de Stephen King. Inspiré de faits réels, le film décrit la sidération d’une petite communauté face à la disparition simultanée d’une classe entière d’écoliers. La comparaison avec King devient encore plus évidente lorsqu’un personnage inquiétant affublé d’un maquillage de clown usé surgit à l’écran. Malheureusement, cette filiation s’effrite dès que le récit abandonne sa piste la plus prometteuse pour embrasser une thématique de sorcellerie, sans jamais lui donner la consistance mythologique nécessaire pour convaincre.
À bien des égards, le film s’impose comme un thriller habilement mené. La mise en images de Larkin Seiple, portée par une atmosphère envoûtante, se distingue par des séquences de captation sinueuses et hypnotiques. La partition poignante composée par les frères Ryan et Hays Holladay épaulés par Cregger, enrichit ce climat en explorant une large gamme de nuances sonores et en bâtissant un univers auditif troublant. Une distribution solide ainsi qu’une structure en chapitres originale constituent également de réels atouts. Pourtant, malgré cette maîtrise formelle, le propos demeure limité.
Le phénomène étrange des enfants quittant leur maison à 2 h 17 du matin courant dans les rues obscures de banlieue, les bras déployés comme des ailes avant de disparaître mystérieusement, le tout accompagné de manière marquante par « Beware of Darkness » de George Harrison prête facilement à l’interprétation. Beaucoup y verront une métaphore du chaos tragique qui gangrène les villes américaines à un rythme inquiétant. L’hypocrisie d’une société toujours prompte à désigner des responsables extérieurs, mais incapable de sonder sa propre noirceur, suggère une lecture critique en filigrane.
Rien n’illustre autant à la fois la terreur parentale et la violence armée que l’image glaçante d’une salle de classe désertée. Pourtant, en dehors de l’interprétation intense de Josh Brolin dans la peau d’Archer, père accablé dont la vision d’un gigantesque pistolet semi-automatique illuminant le ciel vient annoncer l’heure fatidique, le récit peine à proposer assez de consistance pour soutenir de telles correspondances symboliques.

Ce film tortueux et dérangeant pourrait dérouter une partie du public mais il retrouve l’énergie chaotique et imprévisible qui avait rendu Barbarian si électrisant (l’une de ses vedettes y fait d’ailleurs un caméo). Toutefois, Weapons s’avère plus étrange que réellement effrayant, ce qui laissera sans doute sur leur faim certains amateurs du genre. Malgré ses failles, le film confirme que Zach Cregger maîtrise parfaitement son art, capable de naviguer entre l’angoisse suffocante et l’humour noir.

Un matin, Justine Gandy (Julia Garner) découvre qu’un seul élève, Alex (Cary Christopher), est présent dans sa classe. La police, accompagnée du directeur Marcus (Benedict Wong), les interroge, tandis que des vidéos montrent les enfants disparus courant mystérieusement vers quelque chose d’invisible. Lors d’une réunion publique, Archer accuse ouvertement Justine, et la tension monte : insultes, menaces, agressions jusqu’à la voir sombrer dans l’alcool, tout en s’appuyant sur Paul (Alden Ehrenreich), un jeune policier. Garner incarne brillamment cette héroïne soupçonnée, fragile mais déterminée, tendre avec les enfants et durement marquée par l’hostilité ambiante.


Cregger structure le récit en chapitres centrés sur différents personnages. Dans celui de Justine, elle brave les interdits pour suivre Alex chez lui et découvre une scène troublante : ses parents, figés dans un état catatonique derrière des fenêtres occultées. Les sections suivantes « Archer », « Paul », « Marcus », « Alex » et « James » apportent chacune une nouvelle perspective. James (Austin Abrams), toxicomane désespéré et sans-abri, cherche à profiter de la récompense promise pour retrouver les enfants, tout en commettant des cambriolages de plus en plus risqués.
Peu à peu, l’histoire révèle que des forces inconnues poussent des individus ordinaires à une violence insoutenable. Justine et Archer deviennent alors des alliés improbables. Le récit adopte parfois une tonalité lynchienne, mêlant étrangeté et humour grotesque, jusqu’à l’introduction tardive d’un personnage sinistre qui éclaire enfin la situation.


Grâce aux images somptueuses et nerveuses du chef opérateur Seiple, essentiellement tournées avec des effets pratiques, l’œuvre ne bascule jamais dans la banalité. Le mélange de comédie décalée, de violence viscérale et de tension implacable conduit vers un final sauvage, chorégraphié avec une puissance et une intensité comparables aux plus grandes conclusions de l’horreur récente.